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Actualités 8 janvier 2021

Leslie Widmann promue Chevalier de la Légion d’Honneur "c’est d’abord une belle reconnaissance pour l’économie bleue"

Spécialiste en économie maritime, Leslie Widmann a pour port d’attache l’Ile d’Oléron où elle a travaillé 5 ans à La Cotinière en tant que Directrice du Développement avant de s’occuper du port en qualité d’adjointe au Maire de Saint-Pierre d’Oléron, de 2008 à 2014. Ex-conseillère communautaire de l’Ile d’Oléron, membre de plusieurs associations locales, elle est très engagée dans la vie oléronnaise où elle a fondé son entreprise en 2000. Elle vient de se voir récompensée à ce titre lors de la promotion du 1er janvier 2021 de la Légion d’Honneur au grade de Chevalier.

La Ministre de la Mer a souhaité que vous soit attribuée la Légion d’Honneur au regard de votre engagement pour l’économie bleue, qu’en pensez-vous ?

L’entreprise que j’ai fondée en 2000, Odyssée Développement, est un bureau d’études en Economie Maritime qui intervient pour les filières professionnelles maritimes : pêche & cultures marines, transport maritime, nautisme et plaisance et aménagement du territoire en région maritime.
En France, Outre-Mer et à l’International, notre équipe défend les métiers maritimes et leur rôle dans l’économie des territoires.
Les femmes et les hommes du secteur maritime occupent des emplois vitaux pour les régions maritimes et concourent à la sauvegarde et au devenir d’éléments précieux du patrimoine, notamment par la transmission des savoir-faire et des valeurs des gens de mer.
Cette très belle distinction souligne ainsi le rôle et la place que l’économie bleue occupe désormais en France, grand territoire maritime mais qui a trop longtemps regardé vers l’intérieur des terres, et cela me réjouit.

Très impliquée localement, vous avez consacré beaucoup de temps au port de La Cotinière, que pensez-vous des projets en cours ?

Le port s’agrandit. C’est un projet ancien et nécessaire. Il faut cependant garder à l’esprit que la pêche est un secteur très évolutif, soumis à de nombreuses contraintes externes et que les projets doivent tenir compte d’un impératif : ne pas alourdir les conditions d’exploitation des navires. Je veux dire par là que le coût des projets doit pouvoir être supporté par les entreprises du site (en l’occurrence marins et mareyeurs) qui acquittent les taxes de passage en criée.
A La Cotinière, la question se pose de savoir pourquoi le port n’est plus géré par la Mairie qui, concessionnaire pendant plus de 30 ans, a laissé une situation comptable des plus correctes au Département, concédant.
La Loi NOTRe est venue modifier les répartitions de compétences des collectivités, mais nous voyons sur la façade atlantique de nombreux ports cogérés par le concédant et les municipalités/communautés de communes/agglomérations via un syndicat mixte (cas des ports de pêche de La Rochelle et Royan) ou directement par les acteurs locaux via des SEM par exemple, dans le cadre de délégations de service public.
La Cotinière a toujours bénéficié d’une souplesse de gestion et d’une forte réactivité du fait de la gestion par la Mairie, au plus proche des marins et mareyeurs. Changer de modèle de gestion est un risque dans le contexte actuel. La Mairie et la Communauté de Communes (qui a la compétence économique) pourraient utilement se positionner auprès du Conseil départemental de Charente-Maritime pour proposer une cogestion via un Syndicat Mixte ou une SEM afin que les professionnels puissent continuer à participer étroitement à la gestion de leur outil de travail.

La Cotinière est un port remarquable où il y avait une tradition de projets collectifs. Le secteur sait faire face aux aléas de l’activité quand il se réunit. A l’inverse de bien des ports, La Cotinière compte de nombreux jeunes, patrons et matelots, passionnés par ce métier et qui s’y investissent. C’est pour eux qu’il faut retrousser les manches, préparer l’avenir avec des équipements adaptés et veiller à ce que les coûts ne soient pas disproportionnés.

Avec Odyssée Développement vous travaillez dans de nombreux ports de pêche en France et à l’international, est-ce que les situations y sont similaires ?

Notre équipe est composée de passionnés qui naviguent tous. A chacune de nos missions, nous embarquons sur des bateaux professionnels. J’ai ainsi pu naviguer dans des endroits très différents : en Irlande du Nord, en Espagne, en Belgique, à Djibouti, au Brésil, en Guyane, en Martinique, en Nouvelle-Calédonie, au Maroc, en Algérie, aux Comores… c’est notre marque de fabrique chez Odyssée.
Ces expériences en mer me permettent de dire que « c’est partout pareil » et « partout différent ». Ce qui est similaire, dans des pays aussi différents, relève des valeurs des gens de mer, qui sont les mêmes, quelle que soit la langue parlée, le type de navire, le métier … et ce qui est différent est lié à la situation locale, dont les organisations varient à l’envie et marquent le côté passionnant de notre métier.
Il faut partout s’adapter, écouter, regarder, comprendre et essayer de construire avec les personnes concernées les solutions qui leur correspondent et seront possibles à mettre en place.
Notre vision est soucieuse de durabilité, l’objectif est de s’inscrire dans l’avenir. En 2018 j’ai souhaité rejoindre le Groupe Elcimaï et sa filiale Elcimaï Environnement avec qui nous développons ces solutions.

Quel exemple vous a le plus frappé ?

Il y en a beaucoup.
Récemment à Djibouti, pays musulman, j’ai été frappée par l’exemple de trois femmes, patron-pêcheurs qui avaient repris la barque de pêche de leur mari décédé et dirigeaient chacune un équipage de 3 hommes ; elles étaient respectées et les voir partir en mer, à la barre de leur bateau, m’a convaincu de la noblesse de ce métier où tout est possible, pour qui donne les preuves de sa valeur professionnelle.

Plus récemment, j’ai été touchée par la situation des pêcheurs de Konna, au cœur du Mali, qui vivent de la pêche fluviale (près de 150000 tonnes par an de poissons pêchés dans le delta du Niger soit plus de la moitié du total des pêches françaises) et maintiennent leur activité, transmettent leur savoir-faire aux plus jeunes, dans un contexte de guerre et malgré le bombardement récent de leur port.

Plus proche de nous en France, j’ai envie de citer le Conseil Départemental de Seine Maritime qui a pris le relais du gestionnaire privé de la criée de Fécamp pour que ce port garde un outil de travail collectif et qui vient d’y investir dans une SEM associant les marins et les acteurs locaux, avec un esprit d’ouverture et de confiance dans la pêche qui est hélas trop rare.

Une femme dans ce domaine, avez-vous parfois essuyé des difficultés ? des critiques ?

Oui, mais comme dit le proverbe oriental que Hergé s’est plu à reprendre dans Tintin & Milou : "les chiens aboient... la caravane passe !"

Et la Présidence du Lycée Maritime de La Rochelle, quel lien avec vos engagements ?

Un lien très fort. Je croyais connaître cet établissement. Y présider le conseil d’administration m’a permis de découvrir l’arrière du décor et d’être sensible à l’engagement remarquable des équipes, de la direction, jusqu’au personnel d’entretien. Ce n’est pas une école comme les autres. Les jeunes qui y sont en BEP, BAC pro ou BTS ont déjà un pied dans leur futur métier et les enseignants font montre de beaucoup de dévouement, ce qui se traduit par un fort taux de réussite aux diplômes et d’employabilité des personnes formées.
Les autorités de tutelle : Région Nouvelle-Aquitaine et Direction Interrégionale des Affaires Maritimes, sont également très présentes et attentives, ce qui est un atout.
Mon rôle consiste notamment à rapprocher le monde professionnel et l’établissement pour créer les passerelles nécessaires à la compréhension des besoins des uns et des autres et veiller à ce que la formation maritime reste attractive.

Je suis en effet convaincue que les métiers du maritime sont des métiers d’avenir pour des femmes et des hommes qui y gagneront correctement leur vie, tout en donnant corps, au quotidien, à leur passion pour l’océan et au fort sentiment de liberté qu’il représente.

Votre prochain voyage ?

En février, en Polynésie Française où nous démarrons l’étude de la gestion du port de pêche de Papeete.

Votre souhait pour 2021 ?

Comme disent mes amis pêcheurs de la Martinique : Tchimbé raid ! pa molli ???? [1]

Retrouvez chaque trimestre les chroniques de Leslie Widmann dans la rubrique Demain la Mer de notre magazine.


[1"tenez bon !"


  • Rodriguez Victor
    11 janvier 2021, 23:54

    Voilà une reconnaissance professionnelle amplement méritée !!!! Reçois mes sincères félicitations chère Leslie et bonne continuation.!!!!!

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