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Territoires 10 octobre 2008

Interview exclusive : Eric Gautier, Président du Conseil général des Deux-Sèvres

Le Petit économiste a rencontré, de manière exclusive, le Président (PS) du Conseil général des Deux-Sèvres, entretien :

LPE : Monsieur le Président, quelques mots sur la conjoncture actuelle ?

EG  : Je pense que malheureusement, on n’a encore rien vu. Les banques réduisent de manière drastique les possibilités de crédit, y compris auprès des collectivités locales. Ce comportement va plomber l’économie. Je pense également que la crise mondiale masque les effets pervers de la politique actuelle du Gouvernement, qui est désastreuse. Permettre à ceux qui sont les plus riches d’investir davantage, c’est sans issue.

LPE : Une question transmise par Jean-Marie Vézinat, Président de la CGPME du département : que pensez-vous du manque de compétitivité des entreprises françaises ?

EG : Je ne suis pas chef d’entreprise, et pour moi, le développement économique est l’affaire des chefs d’entreprise. Nous avons sur ce département des entreprises qui s’en sortent très bien, et des secteurs d’excellence. On peut toujours faire mieux, et je pense que ça n’est pas très productif d’être trop critique.

LPE : Un mot sur deux grandes entreprises du département qui font, pour des raisons différentes, la une de l’actualité : Heuliez et la CAMIF

EG : Heuliez, c’est une vision du capitalisme international, et la reconnaissance d’un potentiel, car personne ne se serait intéressé à cette entreprise si elle n’avait pas un potentiel. J’ai une totale confiance en leurs capacités, le véhicule électrique va les aider à passer ce cap difficile.
Concernant la CAMIF, c’est autre chose, je considère qu’il y a eu des choix historiques qui n’ont pas été bons. Elle a perdu son identité en se mettant sur le marché des autres vépécistes. C’est aussi l’illustration d’un changement fondamental dans les méthodes commerciales : on passe du catalogue papier à Internet, à stock zéro, en sacrifiant le service après-vente, et on vit sur la qualification d’un fichier client.
Je m’interroge aussi sur l’entrée des fonds de pension américains dans l’économie sociale qui est très performante et qu’on ne reconnaît pas suffisamment à mon sens.

LPE : Quelle vision avez-vous du département des Deux-Sèvres au milieu des ses voisins ?

EG : Il est difficile de comparer les départements entre eux. Les Deux-Sèvres se rapprochent beaucoup de la Charente à de nombreux égards. On met souvent en avant le dynamisme de la Charente-Maritime mais il faut prendre en compte tous les paramètres : économiquement, elle est peut être dynamique, mais elle est très en retard sur le nombre de places en maisons de retraite par exemple, la comparaison est difficile, chacun a ses forces et faiblesses.

LPE : Que pensez-vous de la réforme annoncée des collectivités territoriales ?

EG : J’ai toujours pensé qu’à partir du moment où les services de l’Etat demeurent présents à l’échelle d’un département, l’échelon administratif du Département pourra perdurer, mais depuis peu, de nombreuses directions départementales d’administrations sont redéployées au niveau régional. Je pense donc que la fin des Départements est programmée. Face à ce constat, je n’ai pas d’états d’âme, l’essentiel est, je pense, que le même service soit rendu à la population. En Poitou-Charentes, les départements ont des niveaux de richesse assez disparates, ce ne sera pas facile à gérer à partir d’une région. Je crains également que ce soit une manière pour l’Etat de se désengager davantage, ce qui est fortement inquiétant.

LPE : Quelle est l’action du Département sur l’économie ?

EG : Nous avons trois entrées sur ce sujet : l’emploi - l’insertion, les aides versées à travers Deux-Sèvres Initiatives et PROXIMA.
Concernant PROXIMA notre objectif est qu’il soit un outil au service des territoires. Une contractualisation avec les villes de plus de 3500 habitants, les communautés de communes, les pays sera établie pour PROXIMA 2 (2008-2013, 60 millions d’euros de budget), suivant 6 priorités :
- renforcement de l’environnement des entreprises,
- soutien à l’attractivité des territoires par la réalisation d’équipements collectifs,
- adaptation et consolidation des services à la personne,
- valorisation des ressources touristiques,
- renforcement de la mobilité,
- développement des usages et services publics numériques.
L’important est de suivre les choix des territoires, en raisonnant sur des bassins de vie, en cohérence avec l’ensemble des projets.
Nous disposons également du fonds départemental des solidarités qui est orienté vers une bonification des actions portées par plusieurs communautés de communes d’une façon conjointe. En effet, le département des Deux-Sèvres compte beaucoup de communautés de communes, et certaines sont de petite taille. Il est alors plus logique qu’elles se regroupent pour mener des projets d’investissement d’envergure, et nous allons les encourager à le faire. L’accessibilité et le développement durable seront aussi soutenus par ce fonds.

Enfin, concernant l’insertion, nous avons rapproché les services insertion et économie au sein du département, car pour nous les deux sont indissociables. Nous allons par ailleurs mener une réflexion avec les Chambres consulaires sur ce domaine pour rapprocher les besoins des entreprises des attentes des personnes en cours d’insertion dans la vie professionnelle.

LPE : récemment, vous avez évoqué le risque social du RSA, pouvez-vous nous en dire plus ?

EG : les personnes qui sont au RSA sont pour la plupart à temps partiel, ce que je ne considère pas comme un rythme de travail « normal ». D’autre part, le RSA, c’est un soutien financier qui ne donne pas lieu à cotisations sociales notamment pour la retraite. C’est préjudiciable pour le bénéficiaire qui peut ainsi perdre plusieurs années de cotisation. Je serais pour ma part plutôt partisan d’un système comme celui mis en place dans le Territoire de Belfort, à savoir un vrai travail à temps plein, rémunéré au SMIC, et en parallèle une aide financière aux entreprises d’accueil.
Je pense qu’il est nécessaire que le travail de ces personnes soit reconnu en tant que tel, et qu’on sorte du système précaire de l’assistance. Le RSA concerne aujourd’hui seulement 270 personnes en Deux-Sèvres sur une partie du territoire seulement, de plus, on a peu de recul pour évaluer ce dispositif. Normalement, il devrait être généralisé à partir de juillet 2009, mais la loi est actuellement en discussion à l’assemblée, rien n’est donc encore fixé.

LPE : Vous avez augmenté la fiscalité de 6% pour quelles raisons ?

EG : Nous avons augmenté cette fiscalité pour compenser les charges transmises par l’Etat et non compensées par des recettes.
Par exemple, la loi de finances 2006 instaure une réforme de la taxe professionnelle avec un plafonnement pour les entreprises à un taux de 3,5% de la valeur ajoutée. Si le taux d’imposition se révèle être supérieur à cette limite, l’entreprise bénéficie d’un dégrèvement et une partie de celui-ci est à la charge des départements, et prend la forme d’un reversement à l’Etat. Ce blocage de la fiscalité, associé à la frilosité grandissante des banques de crédit, nous a conduit à anticiper notre besoin. D’où la nécessité d’augmenter les taux pour 2008 de 4% afin d’équilibrer un budget qui n’est pas le nôtre (voté par l’ancienne majorité) ; les 2% d’écart étant destinés à compenser les effets négatifs cités ci-dessus.

LPE : Le Département des Deux-Sèvres semble réticent au projet de LGV (Ligne à Grande Vitesse), pour quelles raisons ?

EG : On nous demande 26,8 millions d’euros pour une ligne qui concerne 7 km de LGV en Deux-Sèvres. Ce tracé passe de surcroît en plein milieu du Horst de Montalembert, un site naturel remarquable. Tout ceci pour gagner 10 minutes sur le trajet Niort-Paris ça fait cher la minute ! D’autant plus que la LGV est un produit onéreux : 150 euros le trajet Niort-Paris, ce n’est pas ouvert à tous ! Ce qui nous importe en Deux-Sèvres en terme de transport, c’est de disposer d’axes de communication adaptés et en bon état, pas d’investir dans des projets démesurés et sans utilité.
Pour moi, les contraintes énergétiques et écologiques sont aussi une chance de développement local. On peut les utiliser à bon escient. Citons l’exemple de la restauration dans les collèges , que nous allons associer au développement des bassins de vie avec des fournisseurs locaux, en mettant en place des circuits courts entre production, transformation et consommation. C’est une autre vision du développement économique.

Plus sur www.deux-sevres.com



  • thébault
    10 octobre 2008, 17:01

    Interview exclusive ? Rencontre exclusive ? Un peu de modestie. Ce n’est pas une star que vous interviewez. C’est le président du CG des Deux-Sèvres. Gardez les pieds sur terre. Avant de vous targuer de proposer des scoops, vérifiez que ce sont bien des scoops.
    Richard Thébault

  • Cécilia Rochefort
    10 octobre 2008, 17:51

    Monsieur Thébault, le terme "exclusif" désigne pour moi une interview en dehors de toute conférence de presse ; un entretien au cours duquel on peut parler librement, sans que les choses soient formatées.
    De plus, je n’ai nullement évoqué le terme de "scoop", vous devez confondre, le Petit économiste ne fait pas dans le people, la rumeur, ou le sensationnel... vous avez dû vous tromper de support... rassurez-vous enfin, j’ai les pieds sur terre, tout va bien ! De plus, je pense que les hommes et les femmes qui s’impliquent dans notre région comme ailleurs dans des fonctions électives ou d’entrepreneuriat méritent un peu de respect, c’est tout !
    Et vous, vous faites quoi dans la vie à part la chasse aux scoop ?

  • lihns
    10 octobre 2008, 23:08

    Elle est très intéressante cettte interview, avec des questions que ne poseraient sûrement pas les journaux locaux. Bravo Cécilia, pour cette exclusivité !
    Après, seul Eric Gautier est responsable de ses réponses, évidemment :-)

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